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Etre là où les choses se passent chaque fois qu'il est question d'autisme, avec les autistes, chaque fois que faire se peut...

Temple Grandin : Trucs d’enseignement pour enfants et adultes souffrant d’autisme

Traduction française réalisée par Dr Claude Jolicoeur, pédopsychiatre, Montréal, juin 1996

 

De bons professeurs m’ont aidé à réussir. Je fus capable de vaincre l’autisme, parce que j’ai eu de bons professeurs. A l’âge de 2½ ans, on me plaça dans une maternelle structurée avec des professeurs expérimentés. Plus jeune, j’ai fait l’apprentissage des bonnes manières; la manière de bien me tenir à la table à manger. Les enfants souffrant d’autisme ont besoin d’une journée structurée, et de professeurs qui savent autant utiliser la fermeté que la douceur.

1. Beaucoup de personnes souffrant d’autisme sont des penseurs visuels. Je pense avec des images. Je ne pense pas avec des mots. Toutes mes pensées se comparent, dans mon imagination, à une course sur vidéo. Les images sont ma première langue, et les mots sont mon deuxième langage. Les noms demeuraient les mots les plus faciles à apprendre parce que je pouvais fabriquer, de ce mot, une image dans mon esprit. Pour apprendre des mots, comme « en haut » ou « en bas, » le professeur doit les faire voir à l’enfant. Par exemple, prendre un avion-jouet et dire « en haut » pendant que vous soulevez l’avion sur le bureau.

2. Éviter les longues tirades de directives verbales. Les personnes souffrant d’autisme n’arrivent pas à se mémoriser la séquence des événements. Si l’enfant peut lire, écrivez les directives sur un morceau de papier. Moi, je suis incapable de me rappeler les séquences. Si je demande la direction d’une station-service, je ne peux me souvenir que des trois premiers pas. Les directions comprenant plus de trois pas doivent m’être écrites. J’ai aussi de la difficulté à me souvenir des numéros de téléphone parce que je ne peux en faire une image dans mon esprit.

3. Beaucoup d’enfants souffrant d’autisme excellent dans le dessin, l’art et la programmation d’ordinateurs. Il faut encourager ces plages de talents. Je pense qu’il faut davantage soutenir les talents de ces enfants.

4. Beaucoup d’enfants autistiques se fixent sur un sujet tel les trains ou les cartes. La meilleure façon de traiter ces fixations, c’est de les utiliser pour motiver les apprentissages académiques. Si l’enfant aime les trains, utilisez alors les trains pour apprendre la lecture et les mathématiques. Lisez des livres sur les trains et faites des problèmes de mathématiques avec un train. Par exemple, calculez le temps que prenne un train pour aller de New York à Washington.

5. Utilisez des méthodes concrètes et visuelles pour enseigner les concepts de nombre. Mes parents m’ont donné un jouet de math. qui me favorisa l’apprentissage des nombres. Il s’agissait d’un ensemble de blocs qui possédaient des longueurs et des couleurs différentes pour chaque nombre de un jusqu’à dix. Avec eux, j’ai appris l’addition et la soustraction. Pour apprendre les fractions, mon professeur utilisait une pomme en bois qu’il coupait en quatre morceaux et une poire aussi en bois qu’il coupait en demis. De là, j’ai appris les concepts de quarts et moitiés.

6. J’avais la pire écriture de toute ma classe. Beaucoup d’enfants autistiques ont des problèmes de coordination motrice avec leurs mains. Une écriture bien formée peut devenir quelquefois très difficile. L’enfant vit alors une frustration totale. Pour réduire la frustration, aidez l’enfant à se plaire dans l’écriture; laissez-le taper des lettres sur l’ordinateur. La dactylographie devient souvent plus facile que l’écriture manuelle.

7. Quelques enfants autistiques apprendront la lecture plus facilement que la phonétique, et d’autres apprendront mieux par la mémorisation de mots entiers. J’ai appris à travers les phonèmes. Ma mère m’apprit les règles du phonème et me laissa vocaliser les mots.

8. Quand j’étais enfant, les sons bruyants comme la cloche de l’école me blessaient les oreilles comme la foreuse du dentiste qui touche le nerf d’une dent. Les enfants autistiques ont besoin d’être protégé des sons qui blessent leurs oreilles. Les sons qui les agressent le plus seront la cloche de l’école, les systèmes d’alarme ou d’alerte du mur du gymnase, le son de la chaise qui grince sur le plancher. Dans beaucoup de cas, l’enfant pourra tolérer la cloche ou l’interphone si on l’assourdit légèrement par du bourrage, des tissus ou des rubans adhésifs. Le grincement des chaises peut s’amortir en plaçant des parcelles de balle de tennis au bout des pattes ou en installant une moquette. Un enfant peut avoir peur d’une pièce de la maison parce qu’il craint le bruit soudain et criard du système d’alarme. La peur appréhendée d’un son peut entraîner un comportement inadéquat.

9. Les distractions visuelles et les lumières fluorescentes ennuient certaines personnes autistiques. Ils peuvent apercevoir le vacillement des ondes électriques à 60 cycles. Pour éviter ce problème, placer le bureau de l’enfant près de la fenêtre ou évitez l’utilisation de lumières fluorescentes. Si l’on ne peut éviter les lumières, utilisez les ampoules les plus récentes que vous pourrez trouver. Les nouvelles ampoules vacillent beaucoup moins.

10. Quelques enfants autistiques, hyperactifs qui remuent tout le temps, vont se calmer s’ils portent une veste rembourrée et plombée (veste proprioceptive). La pression du vêtement calme le système nerveux. Cette pression m’a souvent beaucoup calmé. Pour obtenir de meilleurs résultats, il faut porter la veste pendant vingt minutes pour ensuite l’enlever quelques minutes (avant de la remettre). Le système nerveux n’aura pas alors le temps de s’y adapter.

11. Quelques autistiques répondront mieux, auront un meilleur contact visuel et de répartie verbale si le professeur interagit avec eux pendant qu’ils s’amusent sur une balançoire ou se roulent dans un tapis. L’impact sensoriel du balancement ou de la pression du tapis favorise quelquefois le développement de la parole. Le balancement doit toujours demeurer un jeu. On ne doit JAMAIS l’imposer de force.

12. Quelques enfants et adultes peuvent mieux chanter que parler. Ils peuvent mieux répondre si on leur chante les mots et les phrases. Mais certains enfants très sensibles d’oreille répondront mieux si le professeur leur parle en murmurant.

13. Certains enfants et adultes non-verbaux ne peuvent pas, en même temps, assimiler les stimuli visuels et auditifs. Ils fonctionnent sur un seul réseau. Ils ne peuvent pas voir et entendre en même temps. On ne doit pas leur demander de regarder et d’écouter en même temps. On doit leur donner l’une ou l’autre tâche, visuelle ou auditive. Leur système nerveux n’a pas la maturité d’intégrer la stimulation visuelle et auditive en même temps.

14. Chez les enfants et les adultes plus vieux, toujours non-verbaux, le toucher devient souvent le sens le plus fiable. Il leur est plus facile de sensualiser les choses. Les lettres peuvent s’apprendre en leur laissant manipuler des lettres de plastique. Ils peuvent apprendre leur agenda journalier en manipulant des objets, quelques minutes avant le début de l’activité. Par exemple, quinze minutes avant le déjeuner, faites-leur tenir une cuillère. Laissez-les prendre un auto-jouet quelques minutes avant de partir en voiture.

Titre d’origine :  » Teaching Tips for Children and Adults with Autism ».

Traduction française autorisée par Dr Claude Jolicoeur, pédopsychiatre, Montréal, juin 1996.